Eric Bonjour

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Seuls 12% des Suisses contre l'armée
Lors de sa séance plénière du 28 novembre 2006, le Grand Conseil vaudois a accepté une initiative législative visant à retirer toutes les armes d'ordonnance des domiciles pour les entreposer à l'arsenal. Un affront pour tous les citoyens-soldats responsables. Lancée par la députée popiste Françoise Burri, l'initiative cantonale vaudoise a été acceptée par 74 contre 67 et 3 abstentions. Le total des députés présents au moment du vote était de 144. Le débat fut vif et émotionnel. La gauche s'est naturellement exprimée sur les conséquences de l'utilisation d'armes lors de suicides, en essayant d'apporter la preuve que c'est la facilité de l'accessibilité de l'arme qui produit le drame. Nous souhaitons tout naturellement que les actes de violences avec des armes à feu perpétrés contre soi-même ou contre des tiers soient évités dans toute la mesure du possible. Selon le Conseil fédéral (réponse du CF du 4.3.2005 à une question de M. Didier Berberat sur les statistiques sur l'utilisation des armes de service), il n'existe pas de statistiques complètes, ou même partielles, sur le nombre de suicides et d'actes illicites perpétrés avec des armes militaires. La raison est le non différenciation des armes militaires et des autres armes à feu. A titre d'information, selon le DDPS, la Base logistique de l'armée reçoit en retour, par année, seulement 60 à 70 armes militaires saisies par les services de police. Chaque année, un chiffre de 30 à 35 suicides serait annoncé par le DDPS. Pour certains, la preuve est faite qu'il faut consigner les armes militaires dans les arsenaux. Autre élément mis en avant, les tentatives de pressions psychologiques perpétrées contre des tiers, là également aucune statistique fiable n'existant selon le CF. Une polémique insidieuse a débuté lors de l'assassinat en Valais d'une famille connue. Un magazine alémanique, Annabelle, a alors lancé dans son édition du 14/6 une pétition, qui demandait la création d'un registre national des armes et la consignation des armes d'ordonnance militaires. Outre l'image désastreuse montrant un homme pointant son arme sur sa femme, cette pétition médiatique, qui fait suite à celle du Blick sur l'interdiction des Pitbulls, est un affront à tous les citoyens-soldats responsables que notre Pays compte. Le registre a été rejeté par la commission compétente du National par 17 voix contre 8 et la commission de la politique de sécurité refusa par 16 contre 8 de mettre les armes militaires « au placard ». Osons espérer que les chambres fédérales sauront suivre leurs commissions. L'achat d'armes sur la base d'un contrat écrit, avec copie au service cantonal compétent, continuera à être la règle. Pour bien comprendre pourquoi l'essentiel de la droite vaudoise a refusé le renvoi de l'initiative fédérale, il faut s'arrêter sur les statistiques disponibles et les hypothèses qui en découlent. En 2005, 1657 suicides ont été enregistrés en Suisse. 46.2% sont le fait des citoyens helvétiques donc 53.8% sont d'origines étrangères. Dans 30% environ des cas, des armes à feu sont utilisées. Les professionnels estiment la part des armes d'ordonnance à 50%. Donc, par extrapolation, sur 1657 suicides, 115 le seraient avec des armes d'ordonnance. Cela nous donne un autre éclairage. Pour avoir une vision complète des militaires en service, il faudrait ne prendre en  compte que les hommes âgés de 20 à 40 ans. Ce pourcentage, selon une statistique zurichoise, passe à 52%. Le nombre de suicide théorique serait de 60. Aujourd'hui, 200'000 armes d'ordonnance sont conservées à domicile. Il est donc irréaliste de dire que la conservation des armes d'ordonnance à l'arsenal réduirait sensiblement le chiffre des suicides. Il est illusoire d'abandonner une tradition accordant à ses citoyennes et citoyens la confiance qu'ils méritent et limiter ainsi les conséquences des vols massifs d'armes que susciterait le stockage centralisé des armes d'ordonnances. Pour terminer, le lecteur avisé est en droit de connaître les votes nominaux des élus du Centre Droit Vaudois (CDV). Tous les radicaux, libéraux et UDC présents refusèrent l'initiative à l'exception de Mesdames Bottlang-Pittet (PDC), Claire Richard (RAD), Messieurs Serge Melly (RAD), Jérôme Christen (Vevey Libre) qui l'acceptèrent. Une abstention du centre-droite est à notifier. Nous espérons que l'assemblée fédérale saura classer cette initiative cantonale car sa légitimité est contestable au vu du vote serré. Ceci dans un sens comme dans l'autre. Par hypothèse, si le CDV avait voté compact, le résultat aurait été de 71 contre 70 et 3 abstentions, soit un refus de cette dernière. Il faut rester démocrate, mais ridiculiser notre Canton de Vaud à Berne est loin d'être la  volonté de nombre de nos élus, officiers ou non, et de nos concitoyens également. Les armes d'ordonnance au placard, fermé à double tour, certes, mais au placard privé.   Premier-lieutenant Eric Bonjour[1]   Cet article est une version modifiée, et envoyée par l'auteur, d'un texte publié dans Le Temps, le 15 décembre 2006.   Sources : appel nominal 06/INI/027 prise en considération, http://www.protell.ch/, http://www.vbs.admin.ch/; http://www.amnesty.ch/; article de l'ats du 5.9.2006, du Temps du 21 juin 2006, http://www.stopsuicide.ch/, http://www.sifa-schweiz.ch/, 06/INI/027, 24 heures du 12 septembre 2006.     [1] Vice-président SVO-Lausanne et député vaudois.
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